mardi 14 février 2012

Episode 18


[Les cinq paragraphes ci-dessous appartiennent à cinq feuilletons distincts. Ces cinq paragraphes ne se suivent pas - mais font suite aux précédents épisodes des mêmes auteurs.]



(Suite de l’histoire n°1) “Aussitôt, il fut submergé par la culpabilité. Cette pauvre femme, après tout, ne voyait pas dans son fils un cloporte malfaisant, mais une rose au doux parfum. Elle poursuivit : « Ils l’ont emmené, je ne sais où, lui ont bandé les yeux, et depuis je n’ai pas eu de nouvelles, pas une lettre, ils ne le laissent même pas m’appeler. Je ne sais plus quoi faire. Pourriez-vous dire un mot à vos cousins, eux qui sont si bien vus ? Vous savez, c’est parce que nous sommes juifs qu’ils ont fait ça. Peu à peu, ils nous auront tous, ils nous aligneront comme des petites billes, et feront de nous ce qu’ils voudront ». ” (Alice Bé)



(Suite de l’histoire n°2) “Cette piqûre marqua le début d’un cauchemar, dont je ne suis pas encore réveillé. Mes hommes me laissèrent pour mort, sous un palmier, sans doute en hommage à mon amour de la nature et de la vie au grand air. Des fourmis eurent tôt fait d’établir une colonie sur mon ventre. Le Nord, qui occupait ma poitrine, entra en guerre contre le Sud, qui bivouaquait sur mon estomac. La cuvette formée par mon nombril fut le tombeau de nombreux braves. J’observais cela plusieurs jours, tout occupé à demeurer paralysé. Mon téléphone finit par sonner. L’homme qui voulait me vendre du double vitrage m’avait sauvé. Les fourmis déguerpirent. Et un indigène qui passait par là, attiré par la sonnerie, me recueillit, me nourrit, et veilla sur ma convalescence pendant de longs mois.” (David M.)



(Suite de l’histoire n°3) “Je crois que Reinette, par contre, ne s'intéressait à aucun d'entre nous – ou plutôt son affection envers chacun oscillait, selon les jours : je l'aime un peu, beaucoup, etc. Parfois, je croyais surprendre un regard de connivence entre elle et l'un des autres garçons, et alors une douleur soudaine me faisait grimacer. Mais l'instant d'après, elle se tournait vers moi, me proposait d'aller faire une ballade, et tout allait mieux. J'ai su depuis qu'elle passait toutes ses nuits avec Boulier, mais jamais, jamais je n'aurais pu le deviner.” (FG)



(Suite de l’histoire n°4) “Lui retenait son souffle, son regard longeait les tiges pâles des jambes nues, ployées l’une sur l’autre. La belle fleur changeait de couleur avec les images de la télévision. Elle faisait tournoyer doucement sa cheville gauche où s’entrechoquaient mollement des bracelets ; l’ombre de son pied cachait parfois son visage.
Dans ses cheveux sombres elle avait mis trois longues plumes claires ajustées en éventail sur la tempe.
« Tout doux mon petit cancrelat… »
Dans la gorge du jeune homme, à intervalles brefs, la pomme d’Adam faisait des allers et retours : un, deux, trois, quatre, cinq douloureux déplacements dans la gorge… Il retenait mal sa respiration tandis que la voisine s'absorbait dans la dégustation de son pot de glace.
Quelque part, un téléphone portable sonnait.” (Louis Butin)



(Suite de l’histoire n°5) “Elle tombe à la renverse, Kagi Etsuko — sous ses paupières explosent des étoiles vertes, tragiques, elle voudrait crever de même, si Arrow n'est plus de ce monde. Hana-bi la rattrape avant qu'elle ne heurte le comptoir, Keiko se précipite vers sa sœur évanouie et Jo lui tend les bras.

"Faudrait pas lui faire boire un truc fort ?

— Lui donner des claques ? propose le vieux gauchiste.

— Call the 911, call the 911", balbutie la chanteuse passablement éméchée, une bouteille de saké à la main.

Keiko tendrement aide les hommes à allonger Etsuko sur le carrelage de la cuisine, lui passe un chiffon mouillé sur le front tandis qu'Hana-bi lui prend le pouls.

"Bah, pas plus de 70 battements par minute. Ça va aller."

Etsuko ouvre un œil vitreux. Les pendentifs de Jo lui frôlent les cils. Le visage du garçon, lèvres charnues, pommettes hautes, regard innocent, n'a plus rien de l'absurde Indien qui n'a que trop longtemps obsédé la fugitive. C'est bien simple, elle l'a déjà oublié, A. Sa voix ? Elle ne l'entend plus. Les cheveux noirs, épais, les joues toujours bleues de barbe ? Aucun souvenir. Les mains fébriles sur ses seins sur son ventre sur son —

La cantatrice totalement ivre brame à présent We all live in a yellow submarine, ce qui ramène complètement Etsuko à la conscience.” (Dragon Ash)

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